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Il pleut.

De grosses gouttes d’eau roulent sur la vitre de la porte fenêtre. Perles échappées d’un collier dont le fil s’est rompu. Devenues libres, courant sur le verre jusqu’à rejoindre les pierres disjointes de la terrasse pour disparaître bues par la terre assoiffée de septembre. Où vont-elles ?

Au-delà de la vitre d’autres perles s’organisent en rideau de cristal. Je les entends tinter comme un doux carillon lorsqu’entre elles elles viennent s’entrechoquer. Jusqu’au ploc final à la rencontre du sol. Des centaines, des milliers de plocs.

La musique me transporte. La Vivaraise. La glycine, les lézards qui m’abandonnaient leur queue entre les doigts, les mirabelles. Ah, les mirabelles. Et Julia. Les orages qui nous surprenaient et nous ramenaient trempées dégoulinantes en flaques sur le sol carrelé de la cuisine. Pourtant Julia savait mais l’idée de la goutte d’eau, de la fraîcheur de la goutte d’eau roulant sur la nuque, du tissu mouillé plaqué comme une seconde peau lui faisait oublier. Et l’odeur. Dans mon esprit d’enfant promenade avec Julia ne signifiait rien d’autre que marcher sous la pluie. Et marcher sous la pluie ne pouvait être possible sans Julia. Inconcevable.

Retour à la vitre. Au plus fort de l’averse les perles tracent des chemins où s’engage le regard. Puis vient l’envie de suivre le regard. Ouvrir la porte. Sortir. Depuis combien de temps n’ai-je pas choisi de marcher sous la pluie ?

-Tu rêves ?

Julia. L’image de Julia se dessine sur la vitre. Ruisselantes.

Et de m’entendre répondre

-Tu viens, Mémé ? On va se promener.


 

Françoise Royer Rondeau

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